Quelques morceaux
Au printemps, le groupe qui avait décidé de quasiment doubler ses effectifs dix-huit mois plus tôt, les avait déjà réduits dans ces usines de près de la moitié, en renvoyant tous les intérimaires et les prestataires extérieurs. Une saignée dont les usines françaises ne se remettront pas, redoutent les salarié·es.
Les difficultés du secteur éolien sont réelles. Alors que les gouvernements parlent sans cesse de la nécessité d’accroître au plus vite les usages de l’électricité pour répondre aux besoins de l’économie numérique, que tous insistent sur l’impératif de produire une énergie décarbonée pour lutter contre les dérèglements climatiques, l’industrie éolienne aurait dû connaître son âge d’or. Pourtant, elle n’a jamais été aussi bousculée.La hausse des coûts de matières premières, la concurrence chinoise qui inonde les marchés avec des équipements à prix bradés, et enfin le report de nombre de projets ont déstabilisé tout le secteur.
« Dès le rachat d’Alstom en 2015, nous avons compris que nous gênions. Quand on discutait avec nos collègues américains, ils ne comprenaient pas ce que cette activité faisait en France. Pour eux, cela ne se justifiait pas », se souvient Sabine*, ingénieure à Saint-Nazaire. « GE n’a jamais été très intéressé par l’éolien en mer. C’est un secteur très risqué, demandant du clé en main, dominé par les Européens et où il n’a jamais été leader », explique Thomas*, ancien cadre chez GE. « Depuis que l’administration Biden a décidé de subventionner massivement l’installation des énergies renouvelables, le groupe estime bien plus profitable de se recentrer sur l’éolien terrestre aux États-Unis, où il est un leader incontesté, et où il peut imposer une standardisation à ses clients sans discussion et dégager des marges très confortables. Ce qu’il ne peut pas faire dans l’éolien en mer », poursuit-il.
Et sur ces derniers, GE Vernova accumule revers sur revers. Au point que certains sont en train de se demander si le groupe n’est pas en train de connaître la même perte de compétences industrielles que Boeing. Un groupe dont il est très proche, avec lequel il a partagé les mêmes managers et les mêmes stratégies court-termistes actionnariales et les mêmes errements dans l’organisation. Interrogé à ce sujet, le groupe ne nous a pas répondu.
Développée au galop, cette nouvelle éolienne permet à GE de remporter plusieurs appels d’offres d’éolien en mer. Et elle commence à être installée. Mais en juillet, une pale se détache sur le chantier du parc éolien en mer de Vineyard Wind, au large de la côte nord-est des États-Unis. Un mois après, les résidents continuaient à retrouver des débris dans tous les environs. Le chantier a été arrêté et est désormais placé sous la surveillance des gardes-côtes américains et du Bureau de sécurité et de prévoyance environnementale, alors que GE Vernova invoque des « défauts de fabrication » dans les matériaux composites utilisés pour les pales
Ces pertes [Liées à des imputations comptables] sont venues en déduction des autres résultats des filiales de GE en France, qui, selon nos informations, « n’a pas un seul centime d’impôt en France depuis dix ans ». Dans le même temps, sa filiale a encaissé 2,25 millions de crédit impôt recherche pour des produits dont la propriété intellectuelle a été transférée aux Pays-Bas.